Le prix Robert-Lionel-Séguin 2024

25 octobre 2024

Clément Locat et Michael Fish

De façon exceptionnelle et afin de souligner l’ampleur de ses réalisations, l’APMAQ a décerné à titre honorifique le prix Robert-Lionel-Séguin à Michael Fish. 

Architecte de renommée nationale, Michael Fish est une figure marquante de la protection et de la mise en valeur du patrimoine. Ses réalisations sur le plan de la planification, de la restauration et de l’aménagement urbain ont amené les acteurs municipaux et le public à débattre de la valeur de l’architecture et de la conservation du patrimoine. L’ampleur de son œuvre est un témoignage de l’importance culturelle et sociale de l’architecture et du patrimoine.

Oeuvrant d’abord dans la construction de nouveaux bâtiments à Montréal durant les années 60 et 70, Michael Fish développe une passion pour la rénovation et l’entretien de bâtiments déjà existants. Ce changement de perspective deviendra le fil directeur de ses futurs accomplissements professionnels.  En 1974, il co-fonde Sauvons Montréal, un organisme qui travaille pour préserver des bâtiments patrimoniaux de la ville. Citoyen engagé, il s’oppose à la destruction et œuvre au réaménagement d’innombrables édifices historiques, tels la Gare Windsor, le Pavillon des Soeurs Grises, le Collège de Montréal, l’ancienne prison des Patriotes, l’aéroport d’Ottawa-Rockcliffe, et bien plus encore. 

Participant engagé de la démocratie participative, défenseur infatigable du patrimoine bâti, Michael Fish a façonné la métropole grâce à ses nombreux engagements. En 1987, il reçoit la médaille du lieutenant-gouverneur canadien pour ses actions de protection du patrimoine. La Ville de Montréal lui rend hommage en 2003 et lui accorde une médaille pour son travail avec Sauvons Montréal.

Le 41e prix Robert-Lionel-Séguin a été remis à titre honorifique à Michael Fish lors du souper le samedi 19 octobre 2024, au Resto de la Plage. M.Fish a d’ailleurs profité de l’occasion pour raconter comment il a sauvé in extremis plusieurs dizaines d’habitations patrimoniales à Montréal en y créant une coopérative d’habitation.

Ce discours revigorant lui a valu une chaleureuse ovation de la part des membres de l’APMAQ. Par la suite, l’architecte Luc Noppen a pris la parole pour souligner les accomplissements de Mr. Fish. Son discours a fasciné la salle, le voici retranscrit pour la curiosité de nos lecteurs:


Discours de Luc Noppen en hommage à Mr. Fish

(cliquez-ici pour accéder à l’enregistrement vidéo)


«J’ai connu Michael Fish au début des années 70, un peu avant 75 et je vais vous le dire, c’était tout un personnage! Je venais du milieu de Québec, d’un milieu plutôt tranquille, mais à Montréal, il y avait tout un bouillonnement autour du patrimoine urbain, et j’ai eu l’occasion, à travers des réunions de travailler avec lui (Mr.Fish), notamment on s’était rencontré dans le bâtiment qui a brûlé récemment dans le Vieux-Montréal, qui était le siège d’Héritage Montréal.

Donc à un moment donné Héritage Montréal s’est installé là, on s’est rencontré dans son bureau et à plusieurs endroits et j’ai assisté et j’ai collaboré avec lui à un certain nombre de batailles mémorables. Alors bien sûr comme architecte il a travaillé sur les belles maisons, comme celles de la rue St-Urbain, et si vous allez à Montréal arrêtez-vous et regardez. Je veux dire, c’est une coopérative d’habitation qui a sauvé cette enfilade de maison… encore aujourd’hui on se dit comment ils ont fait? Comment ont-ils réussi à une telle époque? 


Mais c’était possible avec, comme vous l’avez entendu, un peu d’acharnement, et c’était tout à l’honneur de Michael d’avoir cette hargne. 


Et il était comme ça dans tout. Dans toutes les rencontres qu’on avait. Des fois on disait, il est intransigeant, il est difficile, il est exigeant. Mais ça nous permettait d’avancer. On parle beaucoup de Phyllis Lambert qui faisait beaucoup de choses, et bien Michael Fish avait l’oreille de Phyllis Lambert, assurément. 

 

Je m’en souviens on a travaillé ensemble dans des rencontres, dans des discussions pour sauver entre autres la Prison des Patriotes. Même si personne au gouvernement ne voulait rien savoir et bien, finalement, c’est un bâtiment qui a été sauvé! Et de la même façon que dans le Vieux-Montréal il y avait plusieurs projets dont je me souviens. On avait discuté de la maison Jacques Cartier, la maison que Parc Canada voulait refaire, encore dans ce projet évidemment, comme fait souvent Parc Canada, ils disaient ’’on va mettre ça propre, on enlève un étage, on refait ça à l’ancienne’’.  À ce moment-là je me souviens de Michael Fish, il était debout au bout de la table et il disait ’’Never!’’ 


Il disait: ’’On va garder ça tel quel, il le faut, le patrimoine, c’est quelque chose qui évolue, il faut garder les traces de toutes les époques’’, et ainsi de suite.


C’était sa façon. Alors qu’à Québec on ne parlait pas beaucoup de ça. La première fois que j’ai entendu parler de restauration architecturale dans un encadrement théorique, c’est à cause de Michael, de ce qu’il avait fait, au travers de ses batailles.

C’est à cette époque-là donc qu’on a créé ce qu’on appelait -au départ- le conseil des monuments historiques... c’est finalement devenu Action Patrimoine. Encore là, Michael Fish était là, dès la première heure. Après on a fondé la revue Continuité. Et bon, il y avait des difficultés, à cause de certaines personnes à Héritage Montréal... et aussi le Conseil Français qui voulait être l’organisme fédérant tout le monde … alors qu’en fait Héritage était beaucoup plus actif et avancé. Bref, je vous épargne ces conflits politiques...Tout ça c’est vraiment juste pour vous dire, pour souligner à quel point c’était une époque bouillonnante. 

 

Quand on visite le Vieux-Montréal aujourd’hui, dans les vieux bâtiments qui ont été restaurés, dont on a gardé les étages, les maisons Simon-McTavish et autres...  On se demande, combien de jeunes architectes de McGill, de Concordia, de l’Université de Montréal ont pris leçon sur l’action de Michael Fish et ont fait des choses intéressantes? 


Je veux dire, il a eu tellement d’influence dans cette façon-là de penser le patrimoine. Pour tout ça je voudrais lui rendre hommage. Certainement, ma carrière n’aurait pas été ce qu’elle a été si je n’avais pas rencontré Michael Fish!» 



La transcription du discours de Luc Noppen en hommage à Michael Fish est tiré d’un enregistrement pris au Resto de la Plage le samedi 19 octobre 2024, à Saint-Jean-de-l’Île-d’Orléans:

Prise de Vue Claude Lalonde, Chaire de recherche du Canada en patrimoine urbain, ESG, UQAM

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