La fermeture de l’ouverture d’un mur

6 décembre 2022

Pierre Bleau

Les émissions télévisées de rénovation présentent régulièrement des projets d’agrandissement par l’intérieur. La tendance actuelle est d’offrir aux occupants un concept ouvert. Les travaux consistent à abattre les cloisons entre deux pièces contiguës. Ce décloisonnement reflète une évolution dans nos styles de vie. L’époque où la mère de famille ou la domestique s’activait autour de la cuisinière dans une pièce séparée de la salle à manger est révolue. Aujourd’hui, la préparation des plats s’invite autour d’un îlot de cuisine. L’espace devient un lieu communautaire pour recevoir les invités. Les professionnels du design font recette en créant des aménagements conviviaux au goût du jour. Ils métamorphosent la cuisine en salle d’exposition permanente. Concoctant un éclairage mesuré, ils viennent adoucir ou enrober la blancheur crue des armoires murales. En accompagnement aux comptoirs, ils incorporent une collection d’appareils électroménagers aux lignes épurées, telles des œuvres d’art moderne.

Nous avons plutôt décidé de poser le geste inverse, soit celui de fermer l’ouverture qui se trouve dans le mur et qui divisait anciennement le hall d’entrée de la cuisine. La qualité du travail de démolition réalisé par un précédent propriétaire n’est nullement en cause. À son crédit, le plancher entre les deux pièces est parfaitement de niveau. Combien de fois l’ajout improvisé d’une annexe à un bâtiment se termine par un dénivelé ! De plus, la partie restante de l’ancien mur porteur laissée en place servant à supporter l’étage ne montre aucune déflexion ni fissure apparente. Notre problème avec cette ouverture se situe ailleurs.

Au quotidien, on utilise la porte donnant sur l’aire de stationnement (ill.1). Dès l’entrée, nous nous trouvons dans un espace de 2,1 m sur 3 m avec une hauteur de plafond de 2,8 mètres offrant une vue imprenable sur la cuisine. Cette pièce était autrefois une galerie d’été. Un premier indice se cache sous le plancher constitué d’un contreplaqué recouvert d’un linoléum qui s’appuie sur un sous-plancher. Il présente une pente prononcée vers le mur extérieur. C’est le souvenir d’une ancienne galerie depuis intégrée au bâti de la maison. Elle s’est transformée en véranda d’été puis en vestibule avec l’ajout de murs et de fenêtres.

En ouvrant la porte aux visiteurs, ces derniers peuvent voir toute la famille attablée en train de converser dans la cuisine adjacente, ce qui est un premier désagrément dans notre intimité ; le deuxième, et non le moindre, est l’intrusion d’un courant d’air glacial en période hivernale. Ce flux rafraîchissant se propage allègrement au rez-de-chaussée dès l’ouverture de la porte d’entrée. La facture d’électricité nous a convaincus que les murs du fameux vestibule ne bénéficiaient d’aucune isolation thermique. Nous décidons d’aménager un hall d’entrée plus fonctionnel avec porte coulissante en remontant un mur de division (ill.2).


Les travaux de démolition se limitent à ouvrir le plancher au pied de l’ouverture. La charpente de la cloison doit reposer sur du solide. La largeur du mur à construire est déterminée par la poutre au plafond. L’ossature du mur est préfabriquée à plat sur le sol et la section assemblée dans l’ouverture. En pratique, il faut construire deux parois indépendantes avec un jeu suffisant pour le mouvement de la porte coulissante. Le manuel d’emploi explique comment fixer le rail au cadre en bois et les roues à la porte escamotable.

On a déniché, sur un site de ventes en ligne, une porte à deux panneaux avec quatre grands carreaux vitrés dans sa partie supérieure. Notre vendeur est un installateur professionnel. Il récupère les portes abandonnées par ses clients pour les remettre en circulation. Une fente est pratiquée au bas du cadrage (ill.3) qui assure le libre passage de la moulure des panneaux de la porte. La quincaillerie des poignées, de type encastré et en métal de couleur étain, est accompagnée de vis de surface. Un autre accessoire indispensable est la tirette pour porte coulissante : un petit mécanisme essentiel pour coulisser la porte hors de son cadre. Les montants du côté de la cuisine sont recouverts de panneaux de placoplâtre. Une fois les joints tirés et les surfaces peintes, rien n’y paraît. Le vide entre les montants est insonorisé au moyen d’un isolant en laine de roche. Rappelons que nous avons posé le même type de planche sur les murs du vestibule que sur le revêtement extérieur de la rallonge (ill.4).

Sur la paroi (ill.5), on a suspendu une armoire à pharmacie remplie d’artéfacts, un vieux rabot et un article de La Lucarne immobilisé dans son encadrement. Au pied de la chaise antique, un petit général d’une armée de terre cuite fait le guet…

1- Cette pièce était à l’origine une galerie d’été.
2- Vue de l’ossature du mur de division et de la porte en bois à encastrer.
3- Détail de la fente au bas du cadrage.
4- Le surplus de planches embouvetées en pin jointé du revêtement extérieur devient le parement des murs du vestibule.

5- Le nouveau mur disposé entre le hall d’entrée et la cuisine avec sa porte coulissante.

N’hésitez pas à relire les articles précédents du récit de restauration de cet auteur.


Article tiré de La Lucarne – Hiver 2022-2023 (Vol XLIV, numéro 1).

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