La maison Pichette à Sainte-Famille-de-l’Île-d’Orléans

13 septembre 2016

Arthur Plumpton, ingénieur, photographe et résident de l’Île-d’Orléans

Chaque maison a sa personnalité. Comme pour le profil d’un visage, le mur de pignon d’une maison ancienne nous la révèle, autant et même plus que les façades avec leurs lucarnes et leurs décorations plus récentes. Après trois siècles, le mur de pignon nous montre quelques modifications par rapport à son état d’origine mais les grandes lignes que leurs concepteurs avaient à l’esprit sont toujours présentes. On peut y lire la structure triangulaire rigide, élément unique en construction hérité des maisons médiévales en bois; ces dernières arboraient cependant un élément triangulaire plus fermé qu’on observe d’ailleurs dans les charpentes de la Grèce antique.

La maison Pichette érigée vers 1700 à la sortie est du village de Sainte-Famille, est un témoin de l’époque où la population de l’Île, soit quelque 2000 habitants-censitaires, rivalisait en nombre avec celle de Québec. Les toutes premières maisons de Nouvelle-France ayant été construites en clos de madriers, en pièces sur pièces, en pieux, en colombage pierroté ou en remplissage inconnu, mais rarement en pierres, furent durement éprouvées par les conditions climatiques; c’est pourquoi, dès le début du dix-huitième siècle, ces modes de construction étaient déjà en voie de disparition.

Heureusement, quelques maisons de pierres, de pièces sur pièces et de colombage pierroté de cette époque ont survécu à nos hivers rigoureux.

C’est le cas de la maison Pichette, en colombage ou en « pannes de bois » qui, comme le disent les Français et les Anglais, a résisté aux assauts de la nature. Sa pérennité est clairement visible dans son assise, une fondation de pierres recouverte de mortier qui, en surélevant la charpente inférieure de la maison, l’a préservée de l’humidité destructrice du sol. Les soins constants apportés à ce beau bâtiment au fil des ans ont contribué à en maintenir l’intégrité. Il ne reste que très peu de maisons de ce type à l’Île et même au Québec; elles constituent un important témoin du Régime français.

Entre 1647 et 1709, selon l’étude des architectes Richardson et al. de 1948, on comptait, à l’Île d’Orléans, au moins 19 de ces structures inspirées des constructions normandes et bretonnes. Aujourd’hui, à peine deux d’entre elles subsistent.

Références

  • Bernard Audet, Avoir feu et lieu dans l’île d’Orléans au XVIIe siècle. Québec, Presses de l’Université Laval, coll. « Ethnologie de l’Amérique française », 1990.
  • A.J.H. Richardson, Quebec City: Architects, Artisans, and Builders. Ottawa, National Museum ofMan/Parks Canada, 1983.
  • Ramsay Traquair, dessins de la Maison Pichette par ses étudiants (circa 1925/26) dans The Old Architecture of Quebec: A Study of the Buildings Erected in New France from the Earliest Explorers to the Middle of the Nineteenth Century. Toronto, Macmillan, 1947.

Article tiré de La Lucarne, automne 2016 (vol. XXXVI:4).

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