Le 13 août 1642 Charles Huault de Montmagny, « Onontio » fait ériger le 1er Fort Richelieu, afin de bloquer la circulation des Iroquois sur le Saint-Laurent et assurer ainsi une meilleure protection de la population. Les Agniers le contournant facilement, Montmagny rapatrie hommes et canons cinq ans plus tard.
En 1660, la situation est désastreuse. Les attaques iroquoises n’ont cessé de semer la mort et la ruine sur le fleuve et dans les villes. Vaincre l’Iroquois ou rentrer en France? Pierre Boucher est envoyé comme émissaire à Versailles!
En 1663, Louis XIV décide que la colonie sera dorénavant gouvernée comme une province française, le Conseil souverain est créé et le Régiment de Carignan-Salières débarquera à Québec en 1665.
Quel défi pour les 3 500 habitants qui devront accueillir et héberger 1 200 soldats et participer à la réussite de cette expédition militaire aux pays des Agniers. Quatre forts seront construits sur la rivière des Iroquois : Richelieu, à l’embouchure, Saint-Louis et Sainte-Thérèse, en aval et amont des rapides et Sainte-Anne au lac Champlain.
Les habitants et les indiens alliés s’activent à la fabrication de raquettes, à la construction de 40 embarcations à fond plat pour naviguer sur la rivière et à la production de planches et pièces de bois destinées à la construction… un véritable effort de guerre !
Fin août 1665, Pierre de Saurel et ses hommes, accompagné de Charles Legardeur arrivent avec le mandat de construire le Fort Richelieu à l’emplacement du 1er fort de 1642.
Cette carte, jointe au rapport envoyé par l’intendant Talon au ministre Colbert, illustre l’avancement des travaux au Fort Richelieu en octobre 1665. Ce lieu servira aussi à accueillir les troupes, miliciens et indiens, à transborder les vivres et munitions essentiels à la poursuite de la mission militaire…et à recevoir les dignitaires ! Saluons au passage Courcelle, Tracy et sa garde personnelle, Salières et son état-major, Monseigneur de Laval voyageant sur la barque du marchand Jacques Leber, la dépouille du Capitaine Duprat et l’indien Bâtard Flamand ramené par Saurel pour demander une Paix…
Fort, entrepôt et ancrage pour les barques à l’entrée de la rivière; maisons, campements et plages pour les embarcations à fond plat et canots en amont. Les bâtiments semblent typiques du mode de construction en Nouvelle-France à l’époque, assez solides pour résister à l’hiver canadien, érigés avec des ressources trouvées sur place et des matériaux préfabriqués.
Pour construire si rapidement l’ensemble de ces bâtiments, les bras ne manquent pas. Le soldat s’est fait bûcheron, bâtisseur de maisons et de pays ! Six charpentiers du roi auraient été affectés au service de l’armée et le Sieur Randin agit comme ingénieur.
Les compagnies de Saurel et de Saint-Ours y tiendront la garde à l’hiver 1665-66. Tout est prêt pour accueillir, loger et nourrir les hommes des trois expéditions militaires. La route pour le pays des Agniers est ouverte, l’armée peut commencer sa marche.
Dès 1667, Saurel commence à établir son domaine, à recruter ses censitaires. Combien de ces bâtiments ont survécus au passage de l’armée, aux crues printanières? Ont-ils été intégrés en tout ou en partie dans la construction des nouvelles habitations?
Cette carte marine illustre aussi les dédales des îles du lac Saint-Pierre, variables selon les saisons et les niveaux d’eau. Les havres pour les barques autour du lac sont connus grâce à Champlain, Onontio, aux gouverneurs de Trois-Rivières Le Gardeur et Boucher, au cartographe Jean Bourdon… De plus, la mémoire vive de ces hommes nous indique le site du premier affrontement de Champlain avec les Agniers en 1609, le fameux Cap au Massacre.
La paix revenue, plusieurs officiers demanderont à établir leur seigneurie sur le fleuve. Seul le site au confluent du fleuve et de la rivière peut accueillir plusieurs embarcations de fort tonnage. La vocation de Saurel est tracée!
Article tiré de La Lucarne, automne 2017 (vol. XXXVIII:4).
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