Tel que nous le connaissons aujourd’hui, l’arrondissement de Rosemont−La Petite-Patrie a été constitué en 2002, quoique son appellation remonte à 1989, après que fut donné un rôle consultatif aux comités-conseils d’arrondissements de Montréal. Il est le dernier-né de nombreux redécoupages de territoire effectués depuis le début du 18e siècle dans cette partie de l’île de Montréal alors qu’apparaît le toponyme de la Côte de la Visitation. Des villages seront créés au cours du 19e siècle et le territoire de l’arrondissement chevauche ainsi les anciens villages de Côte-Saint-Louis (1846), de Saint-Louis-du-Mile-End (1878) et de Côte-de-la-Visitation (1870). De ce dernier naîtront en 1895 les villages de De Lorimier et de la Petite-Côte, qui deviendra le village de Rosemont en 1905. Au tournant du 20e siècle, les villages seront annexés à la ville de Montréal.
Autrefois espace rural paisible, le territoire devient dès lors une bruyante banlieue ouvrière, dans ce qui était en quelque sorte le petit Nord de Montréal, nouvellement desservi par le chemin de fer du Canadien Pacifique et par les tramways. Déjà, dans la seconde moitié du 19e siècle, les carrières de pierre grise parsemaient le territoire. L’ouverture des ateliers Angus en 1904, destinés à la construction de locomotives et de wagons, propulsera son développement. On y comptera jusqu’à 12 000 employés durant la Deuxième guerre mondiale, alors que les ateliers produisent munitions et chars d’assaut. Le Vieux-Rosemont correspond à l’ancienne terre Crawford qui, à la suite de l’achat par le CP des futurs terrains des ateliers Angus situés juste au sud, sont acquis en 1903 par la Rosemount Land Improvement Company, dont Herbert Samuel Holt est président fondateur. Son associé, l’homme d’affaires Ucal-Henri Dandurand, se chargera de sa subdivision en lots revendus au grand public.
Les carrières sont presque déjà épuisées et c’est en brique que l’on bâtira les nouveaux quartiers. Brique rouge, orange, cuivre, ocre, brune, émaillée de blanc, de beige ou de rose, disposée en éventail, en relief, la brique offrira sa symphonie. L’architecture résidentielle évoluera avec le temps et les modes. Parmi les curiosités, on ne peut rater les shoe box, de petites maisons à un seul étage souvent retranchées au fond d’un terrain, entre deux duplex ou triplex un peu plus récents. Plusieurs ont ainsi comme fondation des anciennes traverses de voies ferrées en bois traité, voire des rails. Certains secteurs ont par contre des airs de banlieue, voire un air rustique. À l’est du parc Maisonneuve par exemple, on se croirait dans un lieu de villégiature en marchant dans la Cité-jardin du Tricentenaire, un lotissement audacieux inauguré en 1942 et composé d’unifamiliales à un étage et demi, avec des toits à deux versants, tapies sous des arbres dans des rues en cul-de-sac.
Rosemont compte quelques résidences de valeur patrimoniale exceptionnelle qui rappellent le passé agricole du territoire, comme la maison Longpré (1822) sur la 38e Avenue et la maison Étienne-David (1825) sur le boulevard Rosemont. Plus récente, la maison Voyer (1915-1920) a tout d’un château à l’angle des rues Dandurand et Charlemagne.
Royaume de la Promenade Masson, de la Plaza St-Hubert, du marché Jean-Talon et de la Petite-Italie, l’arrondissement a aussi une riche histoire commerciale. En cent ans, il a surmonté la fermeture des carrières de pierre grise en les transformant en espaces verts, la perte des usines Angus en faisant du site un modèle de revitalisation urbaine, ainsi que la concurrence des centres commerciaux en conservant des rues commerciales authentiques.
Ce texte est composé d’extraits du livre Rosemont-La Petite-Patrie : Il y a longtemps que je t’aime, publié en septembre 2017 par la Société d’histoire Rosemont-Petite-Patrie, aux Éditions Histoire Québec.
Article tiré de La Lucarne hiver 2017-2018 (Vol XXXIX, numéro 1).
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